Scylla est une belle ville. Elle m’a vue naître. Elle a abritée ma famille en son sein depuis des générations maintenant. Je m’y sens chez moi plus qu’ailleurs dans Pankara. Étant l’une des guerrières au service de Priam, notre chef, je suis appelée à me rendre partout sur notre territoire. Sauf que je ne me sens vraiment complètement bien qu’ici. Je connais chaque recoin de la ville d’ailleurs, pour l’avoir parcouru à de si nombreuses reprises étant enfant. J’ai vu les aînés s’éteindre, les nouveau-nés inspirer leur première bouffée d’air. J’ai vu les jours heureux, comme les jours un peu plus malheureux. J’ai l’impression d’être une part de l’histoire de Scylla, bien que je ne sois pas prétentieuse au point d’affirmer être importante et avoir changé les choses. Je suis simplement membre d’une ville prospère et accueillante et c’est tout ce qui m’importe. Alors lorsque quelque chose d’anormal se produit à Scylla, je me sens d’autant plus impliquée de par mon appartenance à la ville.

Il s’agit de ma voisine qui m’a averti la première du trouble secouant la ville. J’étais à l’extérieur, en train de terminer de ranger le matériel de pêche de mon père. Depuis mon départ précipité de Galene et en l’absence toujours plus pesante de Calypso, je comble mon esprit préoccupé avec des taches physiques, tel qu’aider mon père sur le bateau. Je me redresse donc vivement, écoutant la femme paniquée qui me raconte l’horreur qu’elle ait vue. Elle n’entre pas dans les détails puisque dès qu’elle m’informe qu’un homme de Scylla est en danger, je me mets à courir dans la direction indiquée par ma voisine. Mes jambes me portent rapidement vers la fameuse scène brièvement décrite. Il y a une petite foule affolée réunit, incapable d’agir sous la peur. Je fends le regroupement avec respect, ne souhaitant pas les effrayer dans une précipitation inutile. Je me retrouve devant le groupe et j’observe d’un œil inquiet l’homme que je connais bien lutter pour ne pas faire un faux pas de trop. Il est dans une position précaire, une corde au cou. S’il ne fait pas attention et perd son équilibre, il va finir pendu devant nous tous. Je sais d’instinct que je ne peux pas m’approcher maintenant pour le délivrer. Quelqu’un a orchestré tout cela et mon regard capte bien vite l’auteur. Neyreen n’est pas originaire de notre clan, mais elle en fait partie désormais et je la considère donc comme une Pankara autant que les autres. Le problème, c’est qu’elle n’a pas adopté nos façons de faire encore et elle réagit parfois d’une manière étrangère à la nôtre dans certaines situations. Comme maintenant, je présume. Il suffit de comprendre pourquoi elle a mit en œuvre une telle horreur et essayer de la convaincre de libérer cet homme, bien que je doute d’avoir la faculté de lui faire entendre raison. « Puis-je savoir ce qui se passe ? Neyreen, pourquoi cet homme est-il traité de la sorte ? »