142 - A la frontière Sengoli & Ashkadi
“Tu pars avec eux, ça motivera les hommes.” Tel sont les derniers mots de son père avant qu’il ne l’envoie à la frontière pour accompagner les guerriers. Elle revenait tout juste de sa chasse avec sa proie quand il lui a annoncé son départ, après quoi, elle n’a eu que quelques heures pour préparer son paquetage et rejoindre les soldats. Comme d’habitude, la jeune fille s’était exécutée. Tout prétexte est bon pour éloigner sa fille de lui, et ça convient plutôt bien à Madaline. Le reste vaut mieux que subir ses assauts.
Ce n’est pas plus facile à vivre pour autant. Elle sait très bien ce qu’il attend réellement de ses expéditions et ce n’est certainement pas de motiver les guerriers. Ils se moquent pas mal que la fille du chef les accompagne. Du moins c’est ce qu’elle pense puisque la majorité s'évertuent à l’ignorer et elle en fait autant. Qu’importe, elle n’attend rien de personne, et ce, depuis des années, depuis qu’elle a compris que personne n’interviendrait entre elle et son père. Tout ce qui importe, c’est d’être loin de son père. Même si ce n’est que temporaire, et limité, c’est une certaine liberté dont elle peut profiter tant que personne ne se préoccupe d’elle.
Le grand homme à l’avant des troupes fait signe d’arrêter tout mouvement, elle l’observe de sous ses cils et retient un soupir de soulagement lorsqu’il annonce qu’ils camperont là cette nuit. Si elle est habituée à crapahuter dans les montagnes pour chasser, elle ne l’est pas pour ce qui est de monter à cheval et son arrière train ne la remercie pas. Bien évidemment ça n’échappe pas aux hommes, dont les plus audacieux se moquent de son balai dans le derrière. Madaline les ignore complètement et décide de marcher pour s’isoler d’eux.
La nuit tombe rapidement, l’air se rafraichit, mais n’égal pas la fraîcheur des montagnes. Signe qu’ils sont proche d’Ashkadi. Proche d’une nouvelle bataille, demain d’après les hommes. Et son père espère assurément qu’elle ne s’en sortira pas vivante, il n’attend pas d’elle qu’elle combatte, juste qu’un ennemi lui tombe dessus et la tue. Ca lui donnera une raison supplémentaire de se battre, une vengeance pour la forme. Même si elle restera à l’arrière, elle doit s’armer parce qu’elle n’a pas l’intention de mourir. Ni aujourd’hui, ni demain, ni jamais. La jeune fille ne lui fera pas ce plaisir.
Elle n’a jamais été si peu à sa place parmi les guerriers de son père, non, en fait, elle n’a sa place nulle part. La solitude lui va bien, ça lui plait, donc, elle le vit plutôt bien. Seulement, il est dur de trouver de l’intimité dans les plaines de la frontière avec Ashkadi, elle a beau se trouver à plusieurs mètres du campement, elle les voit tous, par conséquent, ils la voient aussi. Au moins, si y en a qui vient la faire chier, elle le verra venir de loin.
Elle ignore alors, à quel point elle a tort, lorsqu’elle entend du bruit derrière elle. Madaline se redresse vivement avec un petit couteau de chasse dans la main, ce dernier ne la quitte jamais et s’avère extrêmement utile quand elle se retrouve seule dans les montagnes. La clarté de la lune lui permet de croiser le regard d’un homme aux cheveux long. Que fait-il ici ? La jeune fille ne le quitte pas des yeux, prête à se défendre contre un guerrier, quand bien même elle sait d’avance n’avoir aucune chance. Un homme, ce n’est pas un animal.