[Aileen - Priam] Keep Calm and Hammer On!

Keep calm and hammer on!
feat. Priam

Clan Orketa ~ Alon // Cinquième mois de l'An 142

L’après-midi était déjà bien avancée et le soleil chauffait la cime des arbres de ses rayons déjà puissants pour la saison. La forêt protégeait les habitants de la chaleur tout en leur laissant goûter à cette douce odeur qui annonçait l’arrivée des beaux jours. La ville d’Alon était en pleine effervescence ces derniers jours. La fête du Solstice arrivait à grands pas et déjà les préparatifs allaient bon train dans la capitale du clan Orketa. Les commerçants croulaient sous les commandes et il n’était pas rare de voir les enfants de la ville réquisitionnés pour aider. Mais Aileen n’avait pas ce problème. N’ayant repris la forge de depuis deux ans, la jeune femme de vingt-quatre ans, à peine entrée dans l’âge adulte, montrait déjà un savoir-faire qui avait attiré nombreux clients, anciens comme nouveaux. Suffisamment du moins pour lui permettre de vivre correctement. Mais pas encore assez pour qu’elle laisse les soufflets allumés nuits et jours.

Aujourd’hui était une de ces journées calmes et tranquilles où la jeune femme n’avait pas à marteler l’enclume pour respecter un délai, ce que bon nombre d’autres commerçants lui enviaient en cette période chargée pour la capitale. Alors elle s’occupait, assise à son établi, gravant le métal de commandes déjà terminées, leur ajoutant sa propre touche personnelle. Qu’il s’agisse de clous, de ferrures de portes, de fers à cheval ou de lames d’outils, la jeune femme ne faisait pas de différences. Armée de son burin, elle décorait ses marchandises de motifs linéaires, donnant une certaine beauté et une finesse à la plus simple de ses créations.

C’était ainsi qu’elle avait su se démarquer du travail de son père. Et si au début, ce changement n’avait pas été bien vu par les plus puristes de ses clients qui ne comprenaient pas que « la fille de » ne suive pas le même schéma que son père, il était rapidement apparu qu’Aileen n’en avait que faire de ces critiques qu’elle n’entendait même pas et qu’elle ne se laisserait pas démonter par la perte de quelques clients. C’était à eux de composer avec elle et non le contraire. Et ainsi, elle avait su se faire accepter en tant que forgeron à part entière, digne fille de son père mais avec sa propre méthode.

Car Aileen aimait le travail bien fait et ne manquait jamais d’honorer ses commandes par la qualité. Elle pouvait rester des heures assise sur son tabouret inconfortable ou debout devant l’enclume sans s’arrêter. Et c’était ce qu’elle était en train de faire en cet instant. Assise depuis plusieurs heures, concentrée à l’extrême, elle ne prêtait même pas attention aux allées et venues devant la forge ni aux clameurs qui montaient des arbres l’entourant. Le monde extérieur n’existait plus quand elle travaillait et rien n’aurait pu détourner son attention. Ou presque

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Orion. Il est devenu bien plus qu'un chef ou qu'un mentor pour moi. Il est devenu un père de substitution, grâce à ça nous avons chacun évoqué nos passions et nos envies. Il m'a apprit la confection d'herbes à fumer et moi je lui ai appris à se camoufler, à devenir invisible aux yeux de son propre peuple en se changeant en simple paysan ou en poissonnier. Et lorsqu'il me demanda où est-ce que j'avais appris à faire ça, je lui ai annoncer, sans crainte de jugement, que je l'avais appris lorsque j'étais pirate. Se fondre dans la masse rien de tel pour se remplir les poches discrètement ou pour glaner des renseignements. L'une des choses que l'on partage c'est notre amour de la nature et de temps à autres nous passons deux trois jours en dehors des limites du clan à chasser et à dormir à la belle étoile. Mais cette fois-ci j'y suis aller seul, Orion à du rester à Galene pour organiser une entrevue avec les Ashkadis.

C'est mon deuxième jour dans la forêt Orketa, je saute à bas de l'arbre dans lequel j'ai dormi. Je sors ma dernière lamelle de sanglier séché et l'avale en guise de petit déjeuner, je pars ensuite inspecter les collets que j'ai tendu et je souris de contentement en voyant qu'ils m'ont rapportés deux gros lièvres. Le troisième collet est quand à lui briser, piétiner je dirais par un animal beaucoup plus gros. J'inspecte les environs et fini par tomber sur des empruntes de sanglier, je souris puis pend les lièvres à ma ceinture avant de dégainer le harpon que je me suis fabriquer il y a de cela des années. Je me mets en chasse, inspectant régulièrement le sol à la recherche d'indices. Après de longues minutes je fini par apercevoir le sanglier en question, je grimpe discrètement dans un arbre pour l'observer. L'animal s'abreuve dans un petit ruisseau traversant la forêt. Je me campe sur mes appuis puis saute en direction de la bête, plantant mon harpon dans sa nuque. Avec la force de l'impact la pointe de mon harpon se casse dans un bruit mat. Je peste puis abrège les souffrances de l'animal, j’entreprends alors de le dépecer. Une fois ma besogne achever je le cache dans une légère crevasse entre les racines d'un arbre en le recouvrant de feuillage. Puis je me mets en marche en direction de la ville.

Sur place, je suis en quête d'un forgeron, je demande plusieurs fois mon chemin et on fini par m'indiquer ce que je recherche. J'arrive devant l'échoppe d'un forgeron, j'entends des bruits de burin filtrait par la grande fenêtre-étal sur laquelle est disposé quelques objets en vente dont des armes magnifiquement décoré. Je toque contre la porte assez fort pour couvrir le bruit puis me place devant l'étal mon harpon fixer en bandoulière dans mon dos et la lame cassé dans ma sacoche. On ne tarde pas à venir voir qui à frapper. Enfin "on", plutôt elle. Une jeune femme apparaît devant l'ouverture, vêtu d'un tablier de forgeron.

Un bruit lointain et continu vint troubler la concentration de la forgeronne qui tenta tant bien que mal de retourner à la réalité. Fronçant les sourcils, s’arrêtant dans son geste, elle réalisa alors que le bruit qu’elle avait entendu venait tout simplement de la porte de son atelier. Quelqu’un frappait et attendait apparemment qu’elle vienne ouvrir. Lorsqu’elle travaillait aux soufflets, elle laissait toujours la porte ouverte, mais lorsqu’elle était dans son atelier, il lui arrivait de fermer où même de laisser à Fearghas le soin de recevoir les clients. Mais le garçon n’était pas là aujourd’hui et la jeune femme pensait ne pas être dérangée avant plusieurs heures. Il devait donc s’agir d’une nouvelle commande car rien n’était encore prêt.

Laissant la lame qu’elle était occupée à graver, Aileen se leva, essuya ses mains sur son tablier et alla ouvrir. Elle ne put empêcher une expression de surprise venir s’imprimer sur les traits de son visage en voyant l’inconnu qui se tenait sur le pas de sa porte. Et pourtant, la jeune femme n’était pas du genre impressionnable. Mais l’homme qui lui faisait face avait une allure qui détonait légèrement dans la capitale Orketa. Ce qui poussa la curiosité naturelle de la jeune femme à s’enflammer. Etait-il d’un autre clan ?

Retrouvant contenance, la jeune femme haussa un sourcil inquisiteur et très vite, son regard de connaisseuse se posa sur le harpon attaché dans son dos et dont elle pouvait voir le bout, apparemment cassé. Hochant légèrement la tête, elle prit la parole la première, brisant le silence ;

« C’est pour une réparation ? »

Aileen ne s’embarrassait que très rarement des formules de politesse de base. Et elle avait l’intime impression que son interlocuteur n’était pas non plus du genre à se perdre en paroles inutiles. Lui montrant l’étal devant lequel il se tenait, elle reprit la parole tout en l’invitant à entrer dans l’établi d’un geste du bras.

« J’ai beaucoup plus de choix à l’intérieur si ça vous intéresse. Allez-y, entrez. »

La forgeronne me dévisage durant une poignée de seconde et pose un regard inquisiteur sur mon harpon dont le hampe brisé dépasse de derrière mon dos. Elle comprend rapidement la raison de ma présence et je ne tarde pas à lui confirmer.

- C'est ça.

D'un simple geste elle me montre son étal avant de m'inviter à entrer. Je hoche la tête pour lui montrer que j'ai compris puis parcours l'étal des yeux, ils se posent automatiquement sur un glaive qui m'a l'air parfaitement équilibré, j'effleure son plat du bout des doigts avant m'écarter. Je sors mon harpon brisé de son étui et franchit la porte de la boutique. A l'intérieur, une chaleur assez agréable émane de différents foyers, des outils sont disposés sur un établis, des morceaux de métal reposent dans des caisses et des objets en tout genres meublent la modeste boutique de la forgeronne. Je présente mon arme à cette dernière et lorsqu'elle s'en saisit je sors le morceau de lame de ma sacoche.

- Vous pensez pouvoir le remettre en état ? Pour payer j'ai deux beaux lièvres, un sanglier déjà dépecer qui attend dans une cachette non loin d'ici et... ceci.

J'ouvre une poche cousu sur le côté de mon bras pour en sortir une petite bourse. Je verse son contenu dans ma main puis la déplace à la lumière pour montrer les perles à l'Orketa.

- Ces perles proviennent tout droit de la mer qui borde mon clan.

Précédant l’inconnu, Aileen lui montra le chemin et tous deux pénétrèrent dans l’établi de la jeune femme. Mettant de côté le burin et l’épée sur laquelle elle travaillait avant d’être interrompue, elle se retourna ensuite et en voyant l’inconnu lui tendre son harpon brisé, elle s’en saisit avant d’examiner aussitôt le bout brisé d’un œil critique et fin connaisseur. Hochant doucement la tête, plus pour elle-même qu’en réponse à son nouveau client, elle observa ensuite la lame qui correspondait parfaitement à la cassure du harpon.

A la question de l’inconnu, Aileen ne put réprimer un fin sourire en coin. Bien sûr qu’elle le pouvait, il s’agissait d’un travail facile que même un jeune apprenti pouvait effectuer en un record de temps. Mais elle ne dit rien, car elle pouvait comprendre l’inquiétude lorsqu’il s’agissait d’une pièce à laquelle on était très attaché. Et Aileen eut rapidement confirmation que c’était bien le cas en entendant son nouveau client énuméré les possibles rémunérations. Et lorsqu’il sortit les perles de sa poche et les présenta à la forgeronne, cette dernière le regarda, sincèrement étonnée avant de porter son attention sur les perles, magnifiquement taillées, preuve du travail de l’océan lui-même.

Secouant doucement la tête, la forgeronne reporta son attention sur le harpon, tenant d’une main le harpon et de l’autre la lame, les rapprochant tous deux, observant la brisure. Puis, elle les déposa doucement sur la table et se retourna vers le nouveau venu, prenant enfin la parole.

« Je peux vous le réparer et vous le rendre comme neuf sans que vous aillez même l’impression qu’il ait été brisé. Je peux aussi vous mouler une nouvelle lame si vous le voulez, pour remplacer celle-ci. Mais aucune de ces deux tâches ne vaut une seule de vos perles. Un seul lièvre suffira à vrai dire. »

Pour la première fois, elle lui sourit et désigna l’arme qui reposait sur la table.

« Vous devez particulièrement y tenir pour être prêt à me payer en perles. Elles sont magnifiques mais gardez-les. Vous avez frappé à la bonne porte, je prendrai soin de votre arme. Je m’appelle Aileen. »

La forgeronne observa les perles durant quelques secondes avant de secouer la tête puis porta son attention sur le deux morceaux de mon harpon. Tout en les déposant sur la table, elle m'annonce qu'elle peut réparer mon arme et même me forger une nouvelle lame. Cependant, elle refuse mes perles préférant être payer en lièvre. Je range ces dernières dans la bourse en peau de baleine avant de la replacer dans ma poche. Je souris à la remarque d'Aileen. Oh que oui, j'y tiens autant que je tiens à ma liberté. Sans cet harpon je ne serai plus le même, ce harpon est devenu une part de moi au fil des années.

- Ce harpon est, à mes yeux, ma plus grande richesse. Je l'ai forgé de mes propres mains il y a de cela de nombreux étés maintenant. C'est avec lui que j'ai affronté et tué un squale de plus de 4 mètres.

D'ordinaire les requins sont les gardiens des océans mais celui-ci n'était pas un requin normal et n'avait visiblement pas toute sa tête. Je n'avais eu d'autre choix que de l'abattre pour protéger la population de Westland.

- Et moi je me nomme Priam. Pour ce qui est de moulé une nouvelle lame, serait-il possible de la munir d'un tranchant dentelé ?

A nouveau, Aileen écarquilla les yeux aux paroles de son interlocuteur. Décidément, elle allait de surprise en surprise avec ce nouveau client. Elle observa l’arme avec beaucoup plus d’attention que la première fois, caressant le manche, observant les finissions. Il s’agissait là d’un travail remarquable et de nombreuses questions résonnèrent dans l’esprit de la jeune femme. Elle avait face à elle un homme qui attisait sa curiosité sous bien des plans.

A sa question, elle hocha à nouveau la tête et lui désigna l’établi d’un vaste geste de la main avant de lui répondre :

« Je peux faire à peu près tout ce que vous désirez dans cet atelier. Votre harpon est votre plus grande richesse Priam et bien moi, cette forge est toute ma vie. Je vais vous faire votre lame sans aucun souci. En tout cas… ce harpon est magnifiquement ouvragé. Etes-vous maître forgeron ? »

Elle avait posé la première question qui lui brûlait les lèvres. Mais elle en avait bien d’autres. Sur l’endroit d’où il venait, sur les aventures qu’il avait vécues. En y songeant, une lueur d’envie s’alluma au plus profond de son être et elle détourna bien vite le regard, cachant son trouble. Elle n’avait jamais rien connu d’autre que sa forge et la vie de forgeronne. Et face à elle se tenait un homme qui avait abattu un monstre des mers avec son seul harpon. Pour la première fois de sa vie, la fière Aileen se sentait minuscule face à Priam.

Mais elle reprit bien vite contenance et lui indiqua la porte ouverte dans le fond de l’atelier avant de reprendre la parole :

« Ici c’est juste mon atelier pour orner et vendre ce que je fabrique. La forge est derrière cette porte. Ca ne devrait pas me prendre trop de temps mais si vous avez mieux à faire, vous pouvez repasser récupérer votre harpon en fin de journée, ça devrait être fini d’ici là. Mais si vous désirez rester, vous êtes le bienvenu. »

Un sourire vient illuminé mon visage lorsqu'elle m'annonce qu'elle peut faire ce que je demande et je n'ait aucun mal à la croire quand elle dit que cette forge est toute sa vie, cela se voit dans sa façon d'en parler et de se déplacer. Je ne serais pas surpris si j'apprenais qu'elle pouvait se déplacer dans son atelier les yeux fermés. Je ris lorsqu'elle me demande si je suis un forgeron.

- Oh non, loin de là. Je suis le nouveau second du chef de Pankara. Mais je vous remercie d'avoir pensez cela, j'ai forgé ce harpon en suivant les indications du meilleur forgeron de mon clan.

Deux semaines, j'avais mis deux semaines à le forger car il avait fallu que j'assimile les bases de la ferronnerie avant que je ne puisse commencer ma tâche. Tout les soirs je rentrai à la caserne les bras roussi et j'avais dû me couper les cheveux car ceux-ci prenaient feu et je n'avais pas très envie d'imiter Barbe Noire.

- Je vais rester un peu si ça ne vous dérange pas.

Je lui adresse un léger signe de tête.

Cette fois-ci, ce n’était même plus de la surprise ou de l’effarement qu’on pouvait voir sur le visage d’Aileen. En apprenant qu’elle avait devant elle le second du chef de Pankara, son visage se vida de toute couleur. Elle n’avait pas l’habitude de recevoir des gens importants ici, a vrai dire ça ne lui était encore jamais arrive et la jeune forgeronne se sentit tout a coup bien plus fébrile. Se raclant la gorge, essuyant ses mains subitement moites sur son tablier, elle se détourna et se dirigea vers le fond de son atelier, ouvrant la porte qui donnait sur le cote de la bâtisse, en extérieur, sur une sorte de terrasse couverte où se trouvait la forge.

Puis elle revint vers Priam et lui désigna la porte avant de s’emparer a nouveau du harpon brisé et de sa lame.

“La forge est à côté, juste derrière cette porte. Allez-y le temps que je prenne ce dont j’ai besoin et je vous rejoins aussitôt.”

Toujours aussi fébrile, Aileen se dirigea vers ses outils et attrapa au passage deux blocs d’acier qui lui serviraient à mouler la nouvelle lame du harpon. Puis, elle sortit à son tour, déposa le tout sur la table et se dirigea aussitôt vers le foyer qu’elle entreprit d’allumer. Heureusement, il avait déjà servi plus tôt dans la journée et était encore tiède, aussi il ne lui fallut pas longtemps avant de retrouver une température qui ferait fonder l’acier facilement.

Déjà, les gestes mécaniques et réconfortants rassurèrent la jeune femme qui se détendit peu a peu. Elle se tourna vers Priam et lui sourit.

“J’ai choisi l’acier pour vous faire une lame bien plus solide que celle que vous aviez. Mais vous ne verrez aucune différence au niveau du poids ou de la maniabilité je vous le promets. Après tout, il vous faut une lame digne d’un Second!”

Suite à l'invitation de la forgeronne, je me rends dans la deuxième pièce de son atelier. Cette pièce est en fait une cour intérieur couverte dont la majorité de l'espace était occupé par la forge de la jeune femme. Elle me rejoint, les bras chargés d'outils et d'aciers et ne tarda pas à raviver les flammes du foyer. Mes yeux suivent ses mouvements en les superposant avec les gestes que j'avais effectué des années plus tôt, la température et l'odeur du métal chauffer à blanc finissent d'achever mon voyage à travers le temps.

- Je vous fais entièrement confiance !

Je répond à son sourire en m’asseyant sur le bord de la table. Pour moi, une lame d'entrainement peut être tout aussi efficace qu'une lame d'élite. Il suffit simplement de transformer cette lame en extension de soi-même. Cependant, je ne nie pas qu'une lame parfaitement équilibré permettra une meilleure adaptabilité de cette extension. Je sors une algue à fumée et avant de la porter à mes lèvres je m'adresse à Aileen.

- Cela ne nous dérange pas si je fume pendant ce temps ?

Je lui montre mon tube d'algue lorsqu'elle tourne sa tête vers moi.

A la question de Priam, Aileen se retourna brièvement, jeta un regard à son tube d'algue et sourit en secouant la tête.

"Absolument pas. Faites comme chez vous."

Puis, elle reporta son attention sur la fonderie qui avait à présent atteint la température idéale. A l'aide d'une pince, elle attrapa les deux blocs d'aciers et les posa dans le moule au centre de la fonderie. Méticuleuse et précise dans ses gestes, elle oublia bientôt qu'elle n'était plus seule et son corps entier se détendit tandis qu'elle effectuait les gestes si familiers. Son visage était serein et ses gestes assurés. Une fois le métal fondu, elle attrapa le récipient dans lequel reposait l'acier fondu et se dirigea rapidement vers la forge. La, elle versa le métal en fusion dans un moule qui lui servirait de base pour fabriquer la lame du harpon. Une fois l'acier liquide versé, elle attrapa l'ancienne lame et la posa près du moule. Se penchant dessus, elle calcula alors la longueur et la largeur nécessaire afin que la lame corresponde parfaitement au harpon. Il ne fallait pas utiliser trop de matière autrement l'équilibre serait altéré.

Un geste de Priam dans sa vision périphérique la fit presque sursauter et elle le regarda, revenant soudainement à la réalité.

"Désolée... quand je travaille j'ai tendance à oublier le reste du monde... La terre pourrait être en train d'exploser que je ne le remarquerai pas."

Elle sourit et retourna à ses mesures. Mais cette fois-ci, elle n'oublia pas son client. Curieuse, elle désirait en apprendre davantage sur lui mais avait peur de le gêner avec toutes les questions qui se bousculaient dans sa tête. Aussi, elle décida de poser celle dont elle désirait le plus savoir la réponse.

"Dites-moi Priam... Vous êtes du clan Pankara... Comment c'est l'océan? Racontez-moi... Vous dites avoir tué un requin avec ce harpon. Je suppose que ce n'est pas le seul habitant des mers et qu'il doit y avoir bon nombre de trésors là-bas."

Un sourire se dessine sur mes lèvres à la réponse de la forgeronne. Je coince la néreide entre mes lèvres puis l'enflamme avec ma pierre-allume-feu. Je reste silencieux durant les premières minutes de travail d'Aileen tout en expulsant la fumée par petits jets. Les gestes employés par la jeune femme sont calculés et mécaniques, ils traduisent tout son savoir-faire et son expérience accumulés sur des années de pratiques.

- Cela fait combien de temps que vous êtes forgeronne ?

J'attends la réponse de la jeune femme mais cette dernière ne vient pas alors je réitère ma demande. Au bout de plusieurs minutes de silence, je me penche et agite la main en direction d'Aileen et me geste semble la sortir de sa torpeur. Je lui rend son sourire lorsqu'elle m'explique que lorsqu'elle travaille, le monde extérieur s'évapore. Ce sentiment je le connais que trop bien, lorsque je me bats rien n'existe plus à part mon adversaire et moi.

Je réfléchis quelques instants à sa question puis tire une bouffée sur mon algue à fumé avant de répondre.

- L'océan... c'est avant tout une multitude de couleurs, du bleu profond en passant par le turquoise et le vert émeraude avant de se terminer par des nuances de gris. C'est à la fois paisible et sauvage. C'est ce qui nous permet, à nous Pankaras, de vivre mais aussi de croire et de rêver. L'océan est aussi peuplé que le sont chacun des clans, il y a des milliers de poissons différents des grands comme des petits et surtout de toutes les couleurs et de toutes les formes. Il y en a des immenses comme les requins et les baleines, des moyens comme les dauphins et les raies mais aussi des minuscules comme les hippocampes

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